La marine américaine s’est déployée au large du Venezuela.

L’article ci-dessous a été rédigé, avant les dernières tentatives d’invasions de mercenaires lors de l’opération Gédéon, au début du mois de mai. Pour une analyse complète de cette attaque : lire l’analyse de Romain Migus : Attaque de mercenaires contre le Venezuela. Néanmoins la publication [au 16 mai] reste justifiée puisque l’analyse de la situation n’a pas changé (les récents événements tendent d’ailleurs à la confirmer).


Les pions d’une invasion du Venezuela se mettent peu à peu en place. Depuis la reconnaissance, l’an dernier, de Juan Guaido comme président du Venezuela par les Etats-Unis et leurs alliés, la pression et les sanctions sur le Venezuela s’accentuent.

Un nouveau cap a été franchi il y a peu lorsque les Etats-Unis ont décidé d’envoyer, au large des côtés vénézuéliennes, leur flotte. La plus importante depuis 1989. A cette époque les Etats-Unis avaient envahi le Panama pour arrêter le dirigeant du pays Noriega alors accusé de narcotrafic. Aujourd’hui c’est Nicolas Maduro qui est sous le coup de la même accusation, sans aucun fondement et sans aucune preuve. Les Américains promettent la récompense de 15 millions de dollars pour toute information menant à l’arrestation du président du Venezuela, légitime, démocratiquement élu et reconnu par la plupart des pays du monde et par l’ONU. Pour rappel ils n’offraient que 10 millions de dollars pour la capture de Pablo Escobar.

Evidemment personne n’est dupe. Maduro n’est pas plus un narcotrafiquant que le Venezuela est une plateforme de la drogue contrairement à la Colombie, fidèle alliée des Etats-Unis et premier producteur mondial de cocaïne. D’ailleurs n’était-ce pas Juan Guaido, le président fantoche, qui avait été photographié avec des narcotrafiquants colombiens ?

Certains pensent que l’administration américaine, devant sa gestion calamiteuse de la pandémie de Covid19 cherche à détourner l’attention en pointant du doigt un autre Etat. En outre, comme je l’ai déjà indiqué dans un autre article, Donald Trump ne sera pas jugé sur le bilan de sa politique extérieure par son électorat, mais bien sur ses résultats économiques.

[Sur les sanctions économiques] Coronavirus : les sanctions économiques à l’heure de la pandémie

Plusieurs paramètres sont à prendre en considération. D’abord ce déploiement de forces militaires peut tout aussi bien être une tentative d’intimidation du Venezuela, qu’un moyen de flatter l’ego des Américains, même s’il serait parfaitement naïf de penser que les Etats-Unis n’attaqueront jamais. L’histoire [récente] montre que tous les prétextes ont été bons pour envahir et détruire des pays entiers. Sans parler du cas atypique de la Yougoslavie, les exemples de l’Irak et de la Libye semblent assez explicites.

Venezuela : constitution d’une armée parallèle, par Romain Migus
© Miraflores Palace/Handout Source: Reuters

Autre paramètre à prendre en compte : la position du Venezuela. Les Etats-Unis continuent à considérer la zone latino-américaine comme un pré-carré où ils auraient droit de regard et d’ingérence, et le Venezuela est depuis longtemps dans le collimateur du voisin nord-américain. Ajouté à cela que le pays possède les plus grandes ressources pétrolières au monde, des grandes réserves d’or, d’eau douce, de bauxite et qu’il s’est proclamé socialiste, ce qui aux yeux des Américains est une pure hérésie, et il est facile de comprendre pourquoi ce pays pourrait être attaqué.

Si les Etats-Unis déclenchaient effectivement une attaque il leur faudrait alors trouver une raison. En ce sens l’accusation de narcotrafic en est une. Le but n’est pas qu’elle soit juste ou fondée, mais simplement qu’elle existe en tant que telle, quitte à avouer quelques années plus tard une erreur comme ces fameuses armes de destructions massives irakiennes qui n’ont étrangement jamais été trouvées.

Dans un article datant du 9 mai 2019 et intitulé Pourquoi une invasion du Venezuela n’a-t-elle aucune chance de réussir ?, j’expliquais les raisons qui, selon moi, empêcheraient les Etats-Unis d’attaquer ce pays. J’en dénombrais quatre :

  • la loyauté des Forces armées nationales bolivariennes
  • l’existence des milices bolivariennes, fortes de plusieurs millions de membres et présentes sur tout le territoire
  • la conscience révolutionnaire du peuple vénézuélien
  • les soutiens internationaux du Venezuela (dont la Russie et la Chine)

En prenant en compte ces paramètres, tout en considérant que depuis mai les effectifs des milices se sont renforcés, de même que le soutien international dont bénéficie le pays, il est difficile d’imaginer comment le Venezuela pourrait être attaqué directement. Les Etats-Unis auraient bien plus à perdre qu’à y gagner et Trump, malgré sa folie et son obsession criminelle à maintenir les sanctions, n’a pas intérêt à se lancer dans un conflit à quelques mois des élections.

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