Le 28 septembre dernier, l’ancien dirigeant israélien Shimon Peres décédait à l’âge de 93 ans, l’occasion pour une grande majorité des médias de rappeler l’homme de « paix » qu’il était et de le remercier pour son oeuvre. Une vision totalement erronée de la réalité qui traduit l’ambiance générale qui règne lorsqu’on parle d’Israël, un pays qui continue d’être assimilé à la « seule démocratie du Proche-orient ».
De fait, un dirigeant israélien ne peut être un homme de paix, non pas en raison de sa religion comme certains racistes le diraient, mais bien parce que l’Etat d’Israël continue de bombarder le peuple palestinien et poursuit sa politique de colonisation contre les territoires palestiniens.
Ainsi, celui que tout le monde- tout du moins la grande majorité de ceux ayant eu la chance de s’exprimer sur les principaux médias- s’accorde à présenter comme un artisan de la paix israélo-palestinienne ne fut en réalité qu’un dirigeant parmi d’autres, soucieux de l’expansion de son pays. Faut-il rappeler qu’il était un fervent partisan du nucléaire et qu’il souhaitait qu’Israël acquière une forte puissance militaire ? Lorsqu’en 2009, alors en exercice au poste de Président d’Israël, il approuve l’opération « plomb durci », véritable massacre de la population de Gaza par l’armée israélienne, était-ce là un signe de paix ?
Plus généralement, comme l’a très bien exprimé le Parti communiste français, il fut « l’homme des rendez-vous manqués avec la paix ». Car même s’il fut décoré du prix Nobel de paix en 1994, au même titre que Yasser Arafat et Yitzhak Rabin pour les accords d’Oslo, tout le monde sait que ces derniers ne furent pas respectés. Alors même que ces accords étaient voulus par les palestiniens qui avaient dû faire pour cela de lourdes concessions. Mais pire que cela à mon sens, en quittant le Parti travailliste pour rejoindre le parti d’Ariel Sharon, que l’on savait hostile à ces accords, Shimon Peres a contribué à leur échec et de fait a favorisé l’ascension au pouvoir de Netanyahu.
D’ailleurs pour l’ex-ambassadrice palestinienne de l’UE, Leila Shahid, il était surtout le « champion des belles paroles », pas des actes. Il est évident que ses admirateurs trouveront toujours quelque chose à redire afin de démontrer son action en faveur de la paix, comme par exemple la fondation du centre Peres pour la paix, ce qu’ils ne vous diront pas c’est qu’elle fut érigée sur une propriété appartenant à des réfugiés palestiniens.
En réalité on ne peut considérer Shimon Peres comme un acteur de la paix israélo-palestinienne. Lui qui percevait les palestiniens comme une menace démographique, lui qui a joué un rôle important dans la colonisation, lui qui a, à maintes reprises, justifié le blocus inhumain imposé au peuple de Gaza.
L’odieux parallèle avec Nelson Mandela
Dans son discours lors des obsèques de Shimon Peres, le président américain, Barack Obama, a comparé l’ex premier ministre israélien avec le combattant de la liberté sud-africaine que fut Nelson Mandela. Barack Obama aurait pourtant dû savoir que Nelson Mandela était un militant, de la première heure, de la cause palestinienne, il avait d’ailleurs déclaré à ce sujet : « notre liberté est incomplète sans la liberté du peuple palestinien ». De plus, il ne faut pas oublier que Shimon Peres soutenait en son temps le régime d’apartheid sud-africain en allant jusqu’à proposer l’arme nucléaire au gouvernement raciste d’Afrique du sud.
Comment, en ayant connaissance de tels faits peut-on oser comparer un homme, qui s’est battu pour la liberté des siens, contre le racisme et pour la liberté des opprimés, à une personne qui, en tant que chef d’Etat, a donné l’ordre de bombarder des populations civiles et de continuer une politique d’expansion au dépend d’un peuple tout entier ?
L’incompréhensible présence de Mahmoud Abbas
Seul chef d’Etat arabe présent lors des funérailles de Shimon Peres, Mahmoud Abbas en aura étonné plus d’un. En effet, le chef de l’autorité palestinienne était sans doute la dernière personne que l’on aurait imaginé voir aux obsèques. Sans doute voulait-il marquer, de par sa visite, sa volonté d’établir une paix durable avec Israël. Or pour la majorité du peuple palestinien, qui d’ailleurs n’a plus vraiment confiance en Abbas, une paix avec l’Etat d’Israël ne sera possible que lorsque ce dernier cessera sa politique colonisatrice, cessera la discrimination envers les palestiniens, cessera les raids aériens et libérera les nombreux prisonniers politiques.
Se pose aussi la question du massacre de Cana, massacre auquel Shimon Peres n’est pas étranger. Ainsi le 18 avril 1996, arguant du fait de vouloir frapper le Hezbollah libanais, l’armée israélienne attaque en réalité des civils du village de Cana. L’opération baptisée « Raisins de la colère » fera plus d’une centaine de morts civils, ainsi que des casques bleus fidjiens, alors que nombre de civils avaient trouvé refuge dans ce camp de casque bleus, chargé de garantir la paix. Selon les faits établis, et selon le rapport officiel de l’ONU qui en a découlé, il semble qu’Israël avait attaqué ce camp en toute connaissance de cause. Ce fait majeur prouve à lui tout seul la nature de l’homme d’état qu’était Shimon Peres.
Shimon Peres n’était donc sans doute pas l’homme de paix qu’on veut nous présenter même s’il est vrai que lors des bombardements de Gaza par l’armée israélienne en 2014, il avait appelé la cessation des hostilités, mais cela semble désormais tant dérisoire face aux nombreuses victimes civiles palestinienne et arabes.